Nigéria, Niger, Tchad, Cameroun, le groupe islamo-terroriste
Boko Haram [Occident impur] a mené plusieurs attaques en moins de dix
jours dans plusieurs pays sahéliens.
Au Nigeria, au
moins trois personnes ont été tuées et une trentaine blessées dans
une double attaque suicide à Maïduguri, la capitale du nord-est. Deux
femmes kamikazes ont déclenché leurs explosifs le 6 avril dernier au
milieu de la foule dans le quartier. Le 9 avril , ce groupe terroriste
affilié à l’Etat Islamique a attaqué Damaturu, dans l’État de Yobe,
alors même que l’armée régulière se préparait à une telle attaque. « Des
djihadistes de Boko Haram ont lancé une attaque sur Damaturu vers
17h45 (16h45 GMT), tirant des coups de feu et lançant des explosifs » a
déclaré à l'AFP Adamu Sani, un commerçant. « Les habitants
cherchent à se mettre à l'abri et les commerces sont fermés tandis
que des camions de soldats se dirigeaient vers la ville » a-t-il dit.
Hashimu Idris, un fonctionnaire, a ajouté : « Tout le monde est à
l'intérieur. Nous prions pour que les soldats les repoussent sinon ce
sera une nouvelle catastrophe pour la ville déjà attaquée par Boko
Haram en 2014 ». Effectivement, en décembre 2014, Boko Haram avait
lancé un raid sur Damaturu où plus de 150 personnes, dont 38
policiers, avaient été tués. En juin de la même année, un attentat
à la bombe avait fait 21 morts parmi des téléspectateurs regardant un
match de football en public. Cette nouvelle attaque de Boko Haram
intervient alors que l'armée nigériane se prépare à une offensive
contre le groupe islamiste dans l’État de Borno, voisin du Yobe. Deux
mille personnes sont arrivées mardi dans la grande ville de Maïduguri,
capitale du Borno, évacuées par l'armée « en raison d'une opération
militaire pour détruire les insurgés dans la région » a déclaré le
porte-parole de l'Agence nationale de gestion des urgences (NEMA)
Abdulkadir Ibrahim. Un responsable militaire a évoqué une grosse
opération en préparation contre l'ISWAP. Les habitants de Jakana, à
40 kilomètres de Maïduguri, ont été emmenés en camion dans un camp
de déplacés de la ville.
Niger
Toujours le 9 avril
dernier, à Diffa, la grande ville du sud-est du Niger, a été frappée
par une nouvelle attaque d'envergure du groupe djihadiste nigérian Boko
Haram. Des assaillants en nombre indéterminé ont attaqué la caserne
centrale de la gendarmerie de cette ville de 200 000 habitants, située
à quelques kilomètres de la frontière du Nigeria, berceau de Boko
Haram. Après plusieurs heures de combat avec les forces de sécurité
nigériennes, des assaillants, vraisemblablement munis de ceintures
d'explosifs, se sont retranchés au domicile d'un gendarme où ils ont
pris des otages et se sont ensuite fait sauter, selon le secrétaire
général du gouvernorat de Diffa, Yahaya Godi, et d'autres sources. Le
bilan total était encore inconnu au lendemain de l’attaque. « Nous
n'avons pas encore de bilan définitif, mais un bilan provisoire fait
état de deux de nos éléments tués, et de l'autre côté nos forces
en ont tué deux et récupéré leur arsenal » a déclaré à l'AFP
Yahaya Godi. L'attaque a été revendiquée mercredi par le groupe État
islamique en Afrique de l'Ouest (ISWAP en anglais), une faction de Boko
Haram, d'après SITE, un centre américain spécialisé dans la
surveillance en ligne de la mouvance djihadiste. Le groupe fait état
d'un commando de quatre kamikazes, qui aurait tué et blessé des
dizaines de soldats nigériens, selon son communiqué de revendication.
D'après un haut responsable local, s'exprimant sous couvert d'anonymat,
des éléments armés de Boko Haram ont réussi à infiltrer la ville
vers 21h30 (20h30 GMT) mardi 9 au soir. Des tirs et de fortes
détonations ont alors été entendus à la gendarmerie, selon des
habitants. Un élu local, requérant l'anonymat, a rapporté que les
assaillants ont ciblé plusieurs endroits, sans plus de précision. «
Ils ont attaqué principalement le groupement de la gendarmerie où la
fusillade s'est poursuivie jusqu'à 04h00 du matin » a indiqué Yahaya
Godi. « Traqués par les forces de sécurité, les
assaillants se
sont retranchés au domicile d'un gendarme et ont pris en otages
plusieurs personnes » selon le haut responsable local, d'après lequel
l'opération était toujours en cours à 11hOO. « Puis deux kamikazes se
sont fait exploser au domicile d'un gendarme où ils s'étaient
retranchés avec des otages », a expliqué Yahaya Godi, qui n'a pas
précisé si des otages ont péri dans l'explosion ou s'ils ont pu être
exfiltrés.
Un regain d’activité très inquiétant pour le
groupe, car, uniquement en mars, 88 civils ont péri dans ces lâches
offensives au Niger, rapporte l’ONU. A comparer avec 107 victimes pour
l’année 2018 entière.
Tchad
La nuit du 14 au 15
avril, des membres nigérians de Boko Haram ont attaqué la localité de
Bouhama, dans la région du lac Tchad. Le bilan communiqué par l'armée
s’élève à sept militaires tchadiens tués et quinze blessés, et 63 morts
parmi les « terroristes ».
« Les terroristes ont attaqué nos
forces à minuit dans la localité de Bouhama aux environs de
Kaigakindjitia dans la zone du lac Tchad », a annoncé le colonel Azem
Bermandoa, le porte-parole de l’armée, précisant que « 63 terroristes
ont été tués ». Le ministre tchadien de la Défense Daoud Yaya Brahim et
le chef d’état-major des armées Taher Erda ont été dépêchés sur les
lieux ce lundi 15 avril pour « évaluer la situation », selon le colonel
Azem. Récemment nommé à la tête de l’état-major des armées, Taher Erda
est un proche du président Idriss Deby Itno. Il a remplacé Brahim Seid
Mahama le 22 mars dernier. Ce dernier avait été limogé à la suite d’une
attaque de Boko Haram dans le sud-ouest du pays, dans laquelle 23
soldats tchadiens avaient été tués, l’une des attaques les plus
meurtrières essuyées par l’armée depuis le début de la lutte contre les
islamistes.
Cameroun
Dans la nuit du 6 au 7 avril, trois
militaires camerounais ont été tués dans une attaque dans la région
de l'extrême nord du Cameroun revendiquée par la faction de Boko Haram
affiliée au groupe État islamique. Cette faction affirme elle avoir
tué et blessé au moins vingt militaires, a rapporté La voix de
l'Amérique le 9 avril.
Le Cameroun en proie également à une
rébellion de groupes anglophones sécessionnistes n’ayant aucun rapport
avec Boko Haram, si ce n’est le ciblage de civils innocents, est
dramatiquement touché par les djihadistes depuis 2014. Malgré le
déploiement de 3000 soldats à la frontière nord, le pays n’a pu empêcher
des incursions violentes comme lors de l’enlèvement de 60 personnes à
Mokolo à l’extrême nord du pays en janvier 2015.
L’énormité de la
couverture géographique transnationale de l’organisation fait craindre
de donner raison à des chercheurs qui évaluent à plus de 10 000 le
nombre de combattants de Boko Haram, l’armée française l’évaluant à 7000
en 2015. Depuis, il semble que les effectifs ne se sont pas taris au vu
de la fréquence des attaques.